Dans son dernier livre François Gerber tente de réhabiliter Antoine de Saint-Exupéry. En raison de ses réserves concernant l’action du général de Gaulle après le 18 juin 1940 et de sa méfiance envers la personnalité de celui-ci, Saint-Exupéry ne sera pas du nombre des écrivains auxquels le général de Gaulle adresse les remerciements de la France à la fin de la guerre.
Cela en dépit du succès de ses livres Terre des hommes, Pilote de guerre et le Petit Prince, lus et étudiés à travers le monde. Cela en dépit aussi d’un ouvrage si ouvertement engagé comme Pilote de guerre.
Souvent considéré comme un simple témoignage, il s’agit en fait d’un ouvrage qui précise bien les positions de l’auteur dans le conflit mondial. Et qui prouve amplement à quel point les forces aériennes françaises ont fait preuve d’héroïsme en affrontant un ennemi mieux équipé et plus nombreux.
Extrait : « Mais, Antoine éprouve des difficultés pour se concentrer, pour raconter cette expérience hors du commun qu’est la guerre, comme si le souvenir des camarades tués au combat tétanisait sa plume. Il est obsédé par les images de la guerre, des corps hachés par les balles des mitrailleuses allemandes, éclatés par les obus de la Flak. Puis il y a cette odeur, qui remonte sans cesse à son cerveau comme s’il la respirait encore alors qu’il est à dix mille kilomètres des aérodromes de France et que l’affrontement est terminé : celle de la chair brûlée par les flammes, ces flashes brutaux du pilote bloqué dans son cockpit enfumé, prisonnier des vapeurs d’essence et des flammèches… Il ne peut oublier encore le bruit des moteurs qui s’emballent et accélèrent pour échapper aux faisceaux des projecteurs de DCA et revenir dans la protection des nuages. »
Saint-Exupéry, écrivain en guerre, François Gerber, éd. Jacob-Duvernet