Beauté triste, excentrique et mondaine, Natalie Paley est princesse Romanoff. Saint-Exupéry est charmé par cette femme à la grâce mystérieuse et à l’étrange destin. Elle devient sa confidente, le temps de quelques lettres.
Natalia Pavlovna est la fille du grand-duc Paul Alexandrovitch, membre de la famille impérialede Russie et d’Olga Karnovitch. Devant le refus du tsar Nicolas II d’autoriser le mariage morganatique de ses parents, ils fuient la Russie pour s’installer en France où elle nait. Rappelés en 1912, Natalia rentre avec ses parents en Russie où le tsar leur accorde le titre de prince et princesse Paley. Lorsque la révolution de 1917 éclate, elle est brutalisée et vraisemblablement violée avant de s’échapper. Son frère et son père sont emprisonnés, puis assassinés.
Exilée en France, Natalie Paley épouse en 1927 le couturier Lucien Lelong dont elle devient l’icône. D’après ses confidences, le mariage n’est pas consommé. En effet, elle n’a jamais surmonté les traumatismes de son séjour en Russie et a évité toute sa vie les relations charnelles avec un homme. Personnalité fascinante, elle magnétise aristocrates et artistes des années folles.
Jean Cocteau qui l’initie à l’opium,se vante d’une liaison amoureuse avec la princesse et fait courir le bruit qu’elle attend un enfant de lui. Il la choisi pour jouer dans Le Sang d’un poète(1930) et c’est ainsi qu’elle débutesa brève carrière d’actrice. En 1933, elleest la partenaire de Pierre Richard-Willm dans L’Épervier. En 1936, Richard-Willm joue Jacques Bernis, le personnage principal dans l’adaptation de Courrier Sud d’après le scénario de Saint-Exupéry. Au cours du tournage, il aurait présenté Natalie Paley à Antoine de Saint-Exupéry.
En 1937, elle s’établit aux États-Unis où elle épouse en secondes noces le producteur de théâtre John Chapman Wilson, homosexuel affiché.C’est à New York en 1941, que Saint-Exupéry la retrouve et tombe amoureux. Bloqué au Canada en 1942, il lui adresse des lettres poignantes où se mêlent lyrisme amoureux, souvenirs d’enfance, besoin de s’épancher et d’être consolé. Après Louise de Vilmorin, Cocteau et Saint-Exupéry ont en commun d’avoir aimé les deux mêmes femmes, deux femmes du monde qui furent pour chacun des égéries.