Sélectionné pour les deux principaux prix littéraires français, Vol de nuit n’obtient pas le Goncourt mais Le Femina en décembre 1931. L’attribution du Prix Femina à un auteur considéré comme un dilettante en littérature et qui fait son fonds de commerce de son activité d’aviateur suscite des jalousies et des inimités.
Elles s’expriment avec violence dans la presse, si favorable au moment de la publication du livre. On reproche à l’auteur son mysticisme et un style précieux et compassé. On l’accuse de remplacer la fiction par le témoignage et de propager des idées dangereuses en faisant l’éloge du pouvoir autoritaire du chef à un moment où l’Allemagne est en train de se nazifier et où le fascisme naissant trouve des partisans en France aussi.
Mis à part l’amitié de quelques héros de l’air (Mermoz est un des premiers à le féliciter pour son Prix), Antoine de Saint-Exupéry est contesté avec la même irritation dans les milieux de l’aviation. Se rappelant ses étourderies et erreurs de pilotages, ses camardes pilotes s’offusquent de constater que l’auteur est devenu le plus réputé aviateur de France non pas pour des exploits professionnels mais porté par une gloire littéraire qui lui confère un aura immérité à leur sentiment.
Le public n’a cure de ces piques vénéneuses. Vol de nuit se vend à plus de 150 000 exemplaires et Jacques Guerlain sort un parfum nommé Vol de nuit. Aux États-Unis Night Flight est un best-seller et l’adaptation cinématographique confirme le succès de librairie. La traduction anglaise est élu Book of the Month Club, la plus grande distinction littéraire outre-Atlantique.